Introduction

Télécharger L'INTRODUCTION

Télécharger LE RAPPORT COMPLET

‘Nous naviguons sur notre Titanic droit vers un iceberg et nous nous contentons de vérifier s’il ne sort pas trop de suie des cheminées. C’est de la folie.’ 
—Vlaams Bouwmeester Leo Van Broeck

Objet du présent rapport

Les milliers de jeunes qui sont descendus dans la rue au cours des derniers mois dans le cadre de marches climatiques hautes en couleur ont envoyé un message clair à la société et aux décideurs politiques. Le changement climatique menace leur avenir et exige une approche réfléchie, efficace et de grande envergure. Les jeunes demandent à raison aux décideurs politiques d'assumer leurs responsabilités et d'élaborer des politiques répondant à la gravité de la situation telle que la décrivent les climatologues[i]. La science doit nourrir et encadrer le débat, les décideurs politiques doivent prendre leurs responsabilités.

Le groupe d’experts qui a entamé ses travaux à la demande de Youth for Climate a reçu des contributions de plus de 200 scientifiques de diverses disciplines et consulté la littérature scientifique pour faire le point de la situation, en évaluer la gravité et fournir un certain nombre de pistes politiques transversales.

Les jeunes comprennent que la crise climatique n’est pas un problème isolé qui peut être abordé séparément. Ils constatent également que toutes les mesures prises jusqu’à présent, aussi bien intentionnées soient-elles, ont un impact insuffisant et ne sont pas assez structurelles. Ils en appellent au courage de mettre tout en œuvre pour stabiliser le changement climatique à un niveau ne dépassant pas une augmentation de 1,5°C par rapport aux niveaux pré-industriels en vue de garantir, dans toute la mesure du possible, le droit à une vie digne pour les générations futures dans le monde entier.

Pour ramener très rapidement les émissions nettes de gaz à effet de serre à zéro, le statu quo (une situation dans laquelle toutes les émissions de CO2 d’origine humaine sont compensées en un certain laps de temps par le stockage d’une quantité égale de CO2 par une intervention humaine) n’est plus envisageable. La science cerne de mieux en mieux les limites planétaires cruciales que nous ne devons pas dépasser pour organiser la présence humaine sur la planète, et la manière dont des défis tels que le changement climatique, la surexploitation des sols et la perte de la biodiversité[ii] sont interreliés. L’empreinte écologique de l’homme sur la planète est trop lourde et ne peut pas se perpétuer sans conséquences graves pour la survie humaine. La crise climatique en est une des conséquences, et s’y attaquer implique donc une transition sociale en profondeur.

La crise climatique est polymorphe. On peut la décrire comme une forme de dégradation grave ou d’effondrement en cours de l’écosystème planétaire. On peut la considérer comme une crise de la justice. Les personnes qui sont les moins responsables du problème sont les premières victimes tant de l’aggravation du changement climatique que de certaines mesures qui visent à le combattre.[iii] On le constate d’ailleurs non seulement dans une perspective Nord-Sud, mais aussi chez nous. Les récentes manifestations sociales dans notre pays ou ses voisins montrent que les personnes sont préoccupées par la répartition du fardeau de la transition entre les diverses catégories de revenus. La crise climatique peut aussi s’envisager comme une crise économique parce qu’entre autres choses, elle compromet la base naturelle de nos systèmes économiques et qu’elle augmente le risque d’événements climatiques extrêmes, mais aussi parce qu’elle montre comment les lois fondamentales de production, de distribution et de consommation de l’économie actuelle sont inévitablement la cause du problème. La crise climatique peut également être considérée comme une crise de la gouvernance et des politiques usuelles, notamment parce qu’elles manquent de la résilience et de la détermination nécessaires pour faire face aux processus à long terme et à l’imprévisibilité.

Une bonne réponse politique doit tenir compte des différents aspects de la crise climatique pour élaborer des réponses intégrées et structurelles. Les jeunes manifestants pro-climat exigent de la part des décideurs un courage politique sans précédent pour prendre les mesures nécessaires et cesser de se cacher derrière une politique qui ne réfléchit qu’à court terme ou en fonction d'intérêts propres.

Une politique climatique convaincante vise à assurer une existence agréable pour tous, aujourd’hui et demain, ici et ailleurs. En plus de permettre d’éviter un changement climatique dangereux et irréversible, une transition réfléchie et socialement juste offre de nombreux avantages supplémentaires. Il s’agit notamment de la qualité de l’air et, partant, de la réduction des coûts de santé, de la création d’emplois verts et d’une répartition plus équitable de la richesse, ce qui contribue à la cohésion sociale.

Ce rapport du Groupe d’experts sur le climat et la durabilité n’est pas un rapport scientifique empli de calculs précis des différentes solutions possibles. Dans les limites des ressources et du temps impartis, nous nous sommes efforcés - sur la base de ce que nous apprend la science existante - de réunir une série d’ingrédients qui, espérons-le, donneront aux décideurs politiques l’inspiration nécessaire pour s’attaquer à la crise climatique de manière résolue et efficace. Chacun a un rôle à jouer. Les scientifiques doivent établir les faits et leurs conséquences de façon aussi précise que possible. Il appartient aux responsables politiques de définir le cadre et de faire des choix. Les citoyens, les organisations et les entreprises, quant à eux, doivent également prendre leurs responsabilités. Aucun argument ne justifie de reporter davantage le défi. Nous en savons assez pour agir maintenant.

Lire L'INTRODUCTION complète


[i] Pour comprendre la situation climatique, voir GIEC (en anglais IPCC) (2014) : IPCC, 2014: Climate Change 2014: Synthesis Report. Contribution of Working Groups I, II and III to the Fifth Assessment Report of the Intergovernmental Panel on Climate Change [Core Writing Team, R.K. Pachauri and L.A. Meyer (eds.)]. IPCC, Genève, Suisse, 151 p. www.ipcc.ch/report/ar5/syr/

[ii] Pour comprendre la situation de la biodiversité, voir IPBES (2018).  Summary for policymakers of the regional assessment report on biodiversity and ecosystem services for Europe and Central Asia of the Intergovernmental Science-Policy Platform on Biodiversity and Ecosystem Services. Fischer M. et al. (eds.). IPBES secretariat, Bonn, Allemagne. 48 pages. Voir aussi le nouveau rapport IPBES (2019) sur IPBES.

[iii] Voir p. ex. : EEA, Unequal exposure and unequal impacts: social vulnerability to air pollution, noise and extreme temperatures in Europe, 2018. https://www.eea.europa.eu/highlights/protect-vulnerable-citizens